samedi 29 décembre 2012

Jeanne d'Arc, détail de l'histoire

Je me suis insurgé plusieurs fois dans ce blog à propos des mensonges distillés dans nos livres d'histoire. En effet, ce n'est qu'à l'âge d'adulte que j'ai compris que les chemins de notre connaissance avaient été bornés à gauche, et à droite, par les idéologies étatiques ou religieuses.
Non contents de romancer notre mémoire collective, les historiens l'ont repeinte en rose ou en noir, pour répondre aux souhaits de leurs ministres ou de leurs commanditaires.
Ainsi, il serait amusant d'interroger les gens de la rue sur les personnages ayant marqué la fameuse "Guerre de cent ans". Déja, vous pouvez être assurés que la majorité des personnes interrogées sera incapable de vous dire quoi que ce soit sur cette période troublée de l'histoire. Ne parlons même pas des dates.
Une minorité semblera plus savante et résumera l'épisode à une guerre entre les français et les anglais, à cheval sur les XIV et XVème siècles, se terminant par les actions décisives de Jeanne d'Arc, boutant les anglais hors de France.
Penchons nous sur le bac à sable. En effet, les fourmis anglaises et françaises s'étripent joyeusement, grosso modo de 1328 à 1453. Cinq rois se succèdent pendant cette période sur le trone des capétiens: Philippe VI, Jean II, Charles V, Charles VI, Charles VII. La peste taille à grands coups de faux les populations épargnées par les chevauchées anglaises et par la famine.
Jean II passe une bonne partie de son règne à Londres, après avoir été fait prisonnier à Poitiers. On ne peut pas toujours être victorieux dans le Poitou. Charles VI, entre deux périodes de folie, regarde ses oncles se disputer le pouvoir.
Arrive alors des fins fonds de la Lorraine une pucelle. Elle fait partie d'une série d'envoyées de Dieu qui arrivèrent trop tôt, ou trop tard, à la cour de Charles VII. Celle là tombe pile au moment où le roi a le plus grand besoin de redorer son blason. Elle a été annoncée par une prophétie de Brigitte de Suède, rédigée au milieu du XIVè siècle et qui dit à peu près ceci: "La France sera détruite par une femme et restaurée par une pucelle des marches de Lorraine". Ceux qui accordent foi à cette prophétie attribuent le rôle de destructrice à Isabelle de France, fille de Philippe le Bel, épouse d'Edouard II et mère d'Edouard III, l'ennemi anglais.
Jeanne a 17 ans quand elle reconnait Charles VII au milieu de ses courtisans le 6 mars 1429, elle vient de l'est de la France. Le 8 mai 1429,  elle délivre Orléans. Elle échoue devant Paris le 8 septembre 1429, est capturée devant Compiègne le 23 mai 1430 et est brulée le 30 mai 1431. Fulgurante épopée d'une jeune fille de dix-huit ans, sacrifiée par Charles VII après services rendus. Epopée de deux ans vers la fin d'une guerre de 125 ans...
Il faudra encore près de 22 années de guerre pour venir à bout des anglais.
Un de nos personnages politiques modernes, grand connaisseur des "détails de l'histoire" a pourtant fait de cette étoile filante le porte étendard de ses troupes. Il y a sans doute des détails plus importants que d'autres.
Il faudra attendre le début du XIXème siècle et le Romantisme pour que la pucelle soit extraite de ses oubliettes et remise au goût du jour.  Michelet par ses élans lyriques contribuera à exalter le personnage. Monseigneur Dupanloup, célèbre pour d'autres exploits, tentera de faire canoniser Jeanne mais il faudra attendre 1909 pour pouvoir accoler l'attribut de sainteté à le jeune martyre.
La boucle sera ainsi bouclée, avec éclat.

dimanche 18 novembre 2012

Généalogie de la famille Saint Blancat (Haute Garonne) liée à Jean Louis PESCH auteur des Sylvain et Sylvette

Les généalogistes sont des rats d'archives, recherchant dans le dédale des registres paroissiaux, des registres d'Etat-Civil, des tables décennales, des listes de recensement, des registres matricules, la trace de leurs ancêtres. Ils suivent des pistes, plus ou moins obscures, pestant contre les pattes de mouches de certains curés ou officiers d'Etat-Civil, les encres qui ont pali, les pages déchirées, les moississures, les lacunes. Ils haïssent les communards qui ont brulé les deux collections parisiennes, catastrophe incroyable pour tous ceux qui descendent d'anciens habitants de la capitale.
Parfois, au sortir d'un taillis, ils débouchent sur des chemins balisés, progressent par bonds avant de retourner dans la forêt profonde, dans un entrelac de ronces ou d'orties.

J'ai cru longtemps être dans une impasse définitive quant aux ancêtres d'un cocher parisien, du nom de Pierre Saint Blancat. Sa fille Marie Louise Saint Blancat se marie à Paris, le 13 novembre 1894.  C'est inquiétant! Qui dit Paris, dit Commune et incendies. Or l'acte de mariage indique que Marie Louise est née à Paris en 1867. Autant dire que son acte de naissance est parti en fumée les 23 et 14 mai 1871!

Je tourne en rond pendant quelques mois.

Puis la mairie d'Aubervilliers vient à mon secours. Je dois dire ici que cette ville de Seine-Saint-Denis peut être citée au Panthéon des amateurs de généalogie. Son service "Archives-Documentation" est d'une incroyable efficacité et, qui plus est, ils sont d'une extrème gentillesse. Ils me trouvent le mariage d'un frère de Marie Louise, François René Saint Blancat et, miracle, il est indiqué dans le texte du mariage, que ce frère est né en Haute Garonne, au Fousseret en 1864.

Ainsi, entre 1864 et 1867, la famille a "émigré" vers la Capitale. L'intérêt de cette découverte tient dans le fait que la Haute Garonne n'a pas brulé ses archives!!!

L'indien repart sur le sentier. Il parcourt le chemin inverse de la migration des Saint Blancat.

La suite est amusante. Notre cocher parisien est bien né en Haute Garonne. Ouf! il fut conçu par un militaire de passage à Bonrepos-sur-Aussonnelle. Jacquette Paris, ayant fauté avec un certain Jean Saint Blancat, accouche de Pierre le 18 septembre 1840. Le militaire a le bon goût de reconnaitre Pierre:

12 Octobre 1840


Reconnaissance d’enfant naturel
Le douze octobre mil huit cent quarante, à Cette, par devant Antoine Marius Salomon Vivarez et son collègue, notaires à la résidence de la ville de Cette, soussignés___
___ A comparu Monsieur jan Saint Blancat, jardinier, né et domicilié à Fousseret, arrondissement de Muret, département de la Haute Garonne, deuxième cavalier à la deuxième compagnie du Corps du Train des équipages de passage à Cette.
___ Lequel a déclaré qu’il est le père de Pierre, né à Bonrepos, département de Haute Garonne, fils naturel de Jacquette Paris, inscrit sur les registres de l’Etat-Civil de la dite commune de Bonrepos comme fils de la demoiselle Jacquette Paris, né de père inconnu et que le dit Jean Saint Blancat ajoute être né le dix huit septembre mil huit cent quarante.
___ Par suite de cette reconnaissance, Mr Saint Blancat entend que son fils ci-dessus désigné, soit désigné sur les registres de l’Etat-Civil et partout ailleurs, sous les noms de lui comparant et donne tous pouvoirs à tous porteurs de cet acte de faire opérer la mention de cette reconnaissance sur le registre de l’Etat-Civil de Bonrepos.
___Dont acte________
Fait et lu au comparant en l’Etude et les minutes de Mr Vivarez en présence des sieurs Rome Jaumel, limonadier, domicilié à Cette, Terrien François, deuxième cavalier aux mêmes compagnies et corps que le comparant et Gabriel Douat, sergent au 26è régiment d’Infanterie de Ligne, 1er bataillon, sixième compagnie au dépôt à Cette.
Signé avec les notaires non le comparant qui de ce requis a dit ne le savoir. Les dits témoins ont attesté l’individualité de Saint Blancat.________
___Rome Jaumel, F Terrien, Douat, Cazalis Nre Vivarez Nre signés à la Minute____
____En marge de laquelle est la mention d’enregistrement dont la teneur suit.
____ Enregistré à Cette le douze octobre 1840 fol 136 V.O.E. reçu cinq francs décimes cinquante centimes.
Signé Delaya.

 Puis, Jean Saint Blancat embarque pour l'Algérie. Malheureusement, à Oran, il contracte une pneumonie qui l'emporte, six mois après la naissance de son fils.

Service des hôpitaux militaires.
Extrait mortuaire.
Commune d'Oran.
Armée de l'Algérie. Hôpital militaire d'Oran.
Du registre des décès du dit hôpital, a été extrait ce qui suit:
Le sieur Saint Blancat Jean, soldat au septième détachement du Train des Equipages militaires, immatriculé sous le numéro 14204 et annuel 650, né le seize juillet mil huit cent dix sept à Fousseret, canton du dit département de Haute Garonne, fils de Jean Marie et de Marie Avéradère est entré au dit hôpital le vingt neuf du mois de janvier de l'an mil huit cent quarante et un et y est décédé le dix neuf du mois février de l'an mil huit cent quarante et un, à dix heures du matin par suite de pneumonie.Je soussigné, comptable du dit hôpital, certifie le présent extrait véritable et conforme au registre des décès du dit hôpital.
Fait à Oran le dix neuf février mil huit cent quarante et un.
Mées ainsi signé.
Nous, Sous Intendant militaire chargé de la police de l'hôpital d'Oran certifions que la signature ci-dessus est celle de monsieur Mées, officier comptable, et que foi doit lui être ajoutée.
Fait à Oran le dix neuf du mois de février mil huit cent quarante et un.
De Saint Brie ainsi signé.


Pierre sera donc élevé par un certain Joseph Dauban, nouveau compagnon et mari de Jacquette. Dans la Haute Garonne, il épousera, en 1863, Louise Toureau, de Juvardeil, dans le Maine-et-Loire, avant de boucler ses malles, de prendre la direction de Paris et d'y concevoir Marie Louise.
La boucle est bouclée.
¨
Pour la petite histoire, j'ajouterai que Marie Louise Saint Blancat rejoindra Juvardeil, village de Louise Toureau où elle élèvera son petit-fils, un certain Jean-Louis POISSON qui n'est autre que Jean Louis PESCH, le célèbre dessinateur de la série des Sylvain et Sylvette.






dimanche 11 novembre 2012

Maître Jean-Pierre Versini-Campinchi et le droit de naître dans un village

J'ai écouté, avec un grand intérêt, Jean Pierre Versini-Campinchi qui, ce matin, plaidait pour que les enfants qui naissent chaque jour dans les maternités françaises, soient enregistrés dans la ville ou le village de leurs parents.
Aujourd'hui, quand je recherche mes ancêtres, je parcours la France profonde, les petits villages de Maine-et-Loire, de Mayenne ou du Pas-de-Calais. Je retrouve des berceaux oubliés de ma famille, Daumeray, Chatelais, Frévent, Trifouilly.... C'est vrai de Henry IV à René Coty!
Quand, dans une centaine d'années, les nouveaux généalogistes se pencheront sur les Etats-Civils, ils noteront que leurs aieux sont nés à la maternité du Mans, d'Angers, de Laval, de Nantes... Ils ne disposeront d'aucun moyen de savoir dans quel village vivaient leurs arrières grands parents. Ils supposeront qu'ils étaient restés dans les mêmes villages que les générations antérieures mais, le doute subsistera.
Dans les temps anciens, on se mariait dans le village natal de la future épouse. Cela a facilité nombre de trouvailles des généalogistes. Il m'étonnerait qu'on convole de nos jours dans les maternités.
Et comme on meurt rarement dans son lit, il en est de même pour les lieux de décès. La boucle est bouclée. On notera: Jules Tartempion né à la maternité de Versailles, décédé à l'hôpital de Tours... Passionnant!
Par ailleurs, pour trouver une date de naissance dans un petit village il suffisait de parcourir une dizaine de pages. Tout le monde naissant au même endroit, imaginons le casse-tête futur du chercheur.
Bref, Maître Versini met le doigt sur un vrai problème et je l'en remercie au nom des mes descendants.
Au mieux, il suffirait d'une toute petite loi, d'une réforme quasiment sans frais, pour que la secrétaire de mairie de Brissarthe (au hasard) enregistre la naissance de ce joli petit bébé né à Angers de parents vivant au village. Il suffirait d'indiquer l'adresse de la maternité dans les commentaires pour que tout soit clair.
Au pire, une loi pourrait imposer que les grandes villes indiquent dans leurs Etats-Civils le lieu de vie des parents. L'informatique ferait le reste pour que chacun réintègre statistiquement son propre village. Je dis bien, au pire!
Allez, messieurs les législateurs, un petit effort d'intelligence! Cela nous changera! La Commune a fait disparaître par les flammes les registres paroissiaux et les registres d'Etat-Civil (*) de Paris antérieurs à 1870. Les us jettent une couverture opaque sur les Etats-Civils contemporains. Pour Paris, c'est trop tard, la capitale restera définitivement le cauchemar des généalogistes.

(*) Pendant la Commune de Paris, le 23 mai 1871, les communards incendient volontairement de nombreux bâtiments publics dont l’Hôtel de Ville de Paris : le premier exemplaire de l'état civil et des registres paroissiaux est alors anéanti en quelques heures. Le lendemain, 24 mai, ils incendient le Palais de justice : le deuxième exemplaire de l'état civil et des registres paroissiaux disparaît à son tour.



Pour la France moderne, il est encore temps de réagir!

Entre nous, il me semble que l'INSEE peut être mis à contribution dans cette "lutte". Cet organisme recense, chaque année, un cinquième des villes et villages français. Je suis persuadé qu'il trouverait un intérêt statistique à la mise au point de cette nouvelle loi.






jeudi 1 novembre 2012

Planche originale de la bande dessinée de jean Louis PESCH "Vas y Bazille"


Me voici propriétaire de cette magnifique planche originale d'une bande dessinée de Jean Louis PESCH.
Il est émouvant de penser que Jean Louis a passé des heures sur cette feuille dont l'originalité tient dans la présence de tous ses animaux, avec, bien entendu, ses deux héros. Comme c'est la dernière page de l'album, j'ai également la signature de l'artiste.
J'ai ainsi appris que les créateurs de BD dessinent chaque page, à l'encre de chine, sur une grande feuille de 35 x 45 cm (environ). L'éditeur réduit ensuite le dessin au format habituel de 22 x 29 cm.
Il leur faut un sacré sens de la mise en scène puis du cadrage pour déterminer le format de chaque image et y insérer chaque action. La colorisation s'effectue sur un calque ajouté par dessus.
Ces planches sont très recherchées et j'en ai bénéficié en raison de petits services rendus ....

C'est deguisé en PANCHITO, un de ses premiers personnages, qu'il a frappé à ma porte porteur de ce magnifique cadeau.

jeudi 13 septembre 2012

Restaurant à vendre. La Croisière à Brissarthe

La terrasse du restaurant "La Croisière" à Brissarthe


Le village de Brissarthe ne déroge pas à la règle qui veut que tous les commerces de proximité disparaissent peu à peu de nos campagnes.
La Croisière, joli petit restaurant, a fermé ses portes il y a deux mois. C'était la dernière "entreprise" d'un bourg qui compta, il y a une cinquantaine d'années encore, deux épiceries, deux restaurants, un hôtel, une charcuterie, un tailleur, une quincaillerie, un maréchal-ferrand et j'en oublie sans doute. Deux décennies plus tôt, vous auriez également trouvé, un chapelier et un grainetier.
Pourtant, ce dernier restaurant était très viable. Adeline en avait fait le rendez-vous incontournable de tous les VRP, artisans, employés, qui étaient amenés à travailler dans la région. Ils connaissaient cette bonne adresse où, mêlés à quelques habitants du village, à quelques commerçants de Chateauneuf-sur-Sarthe qui n'hésitaient pas à faire le déplacement, ils mangeaient la bonne cuisine de Thierry, dans une atmosphère très conviviale.
Malheureusement, Adeline nous a quittés très vite, frappée par une terrible maladie. Et, la Croisière s'est arrêtée là, auprès de la vieille église romane.
Il suffirait qu'un couple dynamique repère cet endroit, y pose ses valises, rallume les fourneaux, pour que la clientèle revienne, ravie. Tous est prêt pour repartir, dans ce voyage immobile, dans ce bâteau amarré en bord de Sarthe. Les casseroles sont propres, le comptoir est astiqué, les tables ne demandent qu'à être remises en place, dans les trois salles ou en terrasse. Il suffirait de presque rien, peut-être dix années de moins, pour que je leur dise qu'ils viennent (Bon, je sais, c'est une chanson de Reggiani, mais j'avais envie de mettre là ces jolis vers!).
D'ailleurs, je leur dis: "Venez!". Vous serez bien accueillis! Nous vous aiderons à vous faire connaître!
Il y a un défi à relever!

lundi 27 août 2012

Pourquoi je n'irai plus jamais en Tunisie

J'ai intitulé un de mes précédents billets: "Pourquoi je n'irai plus jamais au Sénégal".
Etait-ce le début d'une série?; Je ne sais pas. Mais, en ce qui concerne la Tunisie, je pose le même constat. Ce pays restera l'un de mes  plus mauvais souvenirs de voyage.
Oh, ne croyez pas que je suis un de ces français qui, sortis de l'héxagone, regardent autour d'eux d'un air pincé, les gens et les coutumes! J'ai adoté Cuba, la Turquie, la Grèce, la Crète, le Canada...
Il faut croire que le sud de la Méditerranée ne m'inspire pas.
La Tunisie est un pays de poussière. Les rues des villes sont sales, grouillantes de vendeurs de drouille, avides de vos euros. Ils méprisent les touristes, juste bons à laisser quelques sous dans leurs escarcelles vides. Pas de sympathie ambiante, vous passez des commerçants flagorneurs aux barbus qui vous toisent avec suspission.
Dans les hôtels, le backchich est de rigueur. Au restaurant, au bar, autour de la piscine un sourire se mérite à coups de dinars.
Les plages ne sont pas très propres. Les femmes seules sont des objectifs tout désignés pour les dragueurs locaux.
On ne canalise pas le tourisme autour de sites valant le détour, On crée des sites qui attirent les touristes, des zoos, des spectacles "sons et lumières". Là, dans la chaleur et la poussière, on cotoie des animaux exsangues, des employés de l'ennui, de faux artisans, de faux mariages, de fausses pierres.
Dans des ports de plaisance, comparés sans honte à Saint Tropez ou à Pornic on passe de boutiques qui étalent des tonnes de faux Gucci ou de faux Dior, à des vendeurs de djellabahs "made in china" , négociables entre 10€ et 50€, des terrasses vides, des fausses galères qui, en mer, sont de vraies galères.
Les taxis se négocient au double du prix du compteur.
Deux bonheurs vous seront donnés. Le premier, dans les premières conq minutes de votre arrivée, par le soleil, le second, dans la minute de votre départ, le soulagement de rentrer chez soi.

Entre ces deux moments de votre existence, cette destination "bon marché" vous aura coûté fort cher en heures de vacance perdues!

vendredi 24 août 2012

Rédaction de rentrée: Racontez vos vacances

Devoir de Français.
Classe de 3ème.
Gabrielle D.....

Sujet: Colonie de vacances originale.

Je remercie mon professeur de français pour ce sujet "bateau". Cela fait la quatrième fois qu'on me fait le coup! Bonjour l'originalité!
Cela dit, je vais en profiter pour parler de ma semaine en colonie de vacances, vous pourrez ainsi juger par vous même.
Ma copine Clara et moi, on s'est retrouvées en colo pendant la dernière semaine d'août. Notez bien que c'était une colo particulière, nous n'étions que quatre "pensionnaires". Ma sœur et une de ses copines faisaient partie du lot.
L'un des rares avantages de ce lieu de vacances c'est qu'il est "gratos". A notre époque de crise c'est apréciable! L'endroit est tenu par un vieux couple de retraités. Le vieux s'occupe de nettoyer la piscine et de tondre la pelouse. La vieille fait la cuisine. Il n'y a pas de moniteurs.
J'ai échappé au dortoir des petites. Avec Clara on s'est retrouvées dans une chambre avec deux grands lits.
C'était pratique, le soir, pour discuter. Ah, pour ça, on s'en est payées des bavettes! On empéchait les deux vieux de dormir mais, tant qu'ils ne montaient pas nous dire d'arrêter on causait. C'était bien! Quand le vieux ralait, entre minuit et une heure du matin, on décidait de dormir. Ils sont chiants ces vieux, les boules Quiès c'est pas fait pour les chiens tout de même!
Pour rattraper le sommeil en retard, on se levait vers midi. La vieille avait terminé sa tambouille. On nous forçait à mettre la table ou à faire la vaisselle. Un mauvais moment à passer avant de reprendre nos bavardages.
Après le repas de midi, les deux vieux faisaient la sieste. Comme on les avait empêchés de dormir le veille, ils nous foutaient la paix pour deux ou trois heures. On en profitait pour squatter l'ordinateur.
A leur réveil, on remontait dans notre chambre pour bavarder.
Vers 17h00, on mettait nos maillots de bain et on allait dans la piscine. Le vieux l'avait nettoyée et préparée. Le vieille se remettait à la tambouille pour le repas du soir. La seule fois où il y a eu un problème c'est le premier jour.
Le vieux s'est mis en tête de nous présenter son village et de nous raconter, dans l'église, la bataille qui s'y est déroulée en 866. N'importe quoi! La rentrée c'est dans quinze jours!
Bref, il a fallu mettre les choses au point! On a d'abord fait une tentative d'évasion à vélo mais cela a foiré. Le vieux ne les avait pas encore regonflés.
Alors, on est parties toutes les deux vers l'église en marchant à 50m devant l'ancien. Pas pratique pour lui de nous parler du village à cette distance. Il s'est essoufflé derrière nous.
A un moment, on a croisé une ancienne fermière que je connais. la honte! D'habitude je m'arrête pour lui faire la bise mais là, avec Clara à mes côtés, je suis passée devant elle raide comme un piquet. Un petit signe de tête pour lui montrer que je l'avais reconnue et basta!
Arrivées à l'église on a attendu le vieux en bavardant. Il est arrivé avec cinq bonnes minutes de retard.
Là, il a un peu craqué l'ancien! Il avait compris qu'on se foutait de son histoire comme de l'an quarante! Il nous a passé une avoine, avec des mots bizarres comme "politesse"!
Ou là!
On est des ados nous! La politesse n'est pas au programme du collège! Mais où il va lui avec ses mots compliqués?
Le principal c'est qu'on a coupé à l'évocation historique. Il nous a renvoyées vers la colo. Pas content le vieux! Nous, qu'est-ce qu'on a rigolé!
Et, finalement, on s'était tapé deux km à pied pour rien! On aurait pu éviter ça!
Je crois qu'ils ont compris. Ils avaient envisagé une promenade à pied le long de la Sarthe mais, on n'en a plus entendu parler!
D'autant plus que, le lendemain,  le piquenique auquel ils nous ont obligées à participer chez des amis à eux a été l'occasion de mettre les points sur les I. On a bien voulu dire bonjour. La honte! Puis on s'est éloignées d'une centaine de mètres pour bavarder trois ou quatre heure, jusqu'à ce qu'ils nous rapatrient à la colo. C'est eux qui avaient la honte après ça!
Les jours suivants, on a pu continuer nos bavardages d'adolescentes. On les croisait au moment des repas. Bon, ils se mettaient à la même table que nous mais c'était relativement supportable.
Je dois avouer, pour dire la vérité, que les deux vieux sont mon grand-père et ma grand-mère. Ce n'est quand même pas une raison pour vouloir engager la conversation avec nous!

On est des ados!
C'est l'âge bête!
 Il faut en tenir compte!
Sinon, où on va?

Notation de l'élève et commentaires:
Votre style est un peu familier mais original. NB: Il est inutile de me remercier en début de texte.
Quelques termes et expressions trop triviales: Ex: "Ils avaient la honte...", "gratos","colo" etc...
Utilisation trop fréquente de "On" à la première personne du pluriel. Utilisez "Nous".
Le mot "Politesse" n'est pas compliqué il est seulement difficile à utiliser de manière pratique pour des "ados".
Je vous mets quand même 15/20. J'ai bien rigolé.
J'aprécierais que vous me présentiez vos grands parents. J'adore rencontrer des couillons!
Je leur mets 18/20 en sociabilité et 5/20 en psychologie.Transmettez leur ces notes lorsqu'ils sortiront de la cure qu'ils suivent pour dépression nerveuse.
Je leur conseille la lecture suivante: "Adolescence et psychopathologie par Daniel Marcelli." Ils ne comprendront pas tout mais cela leur fera du bien!
En ce qui me concerne, je vais prendre mon somnifère et mon anti dépresseur quotidiens. Des adolescentes, j'en gère une cinquantaine, alors ...!

jeudi 26 juillet 2012

Joseph KESSEL. L'équipage.

"Ils ne dirent plus rien. Les bruits de l'avenue rendaient plus sensible le silence qu'ils se trouvaient impuissants à rompre. Ils attendirent avec avidité que cet adieu prit fin, que la porte se refermât sur une séparation qui pourtant les déchirait, tellement était intolérable l'instant où, désarmés, ils n'avaient ni la force d'avouer leur angoisse ni celle de feindre.
Jean, surtout, comptait les secondes, ces dernières et lourdes secondes où tout était faux des sentiments exprimés, et le stoïcisme de son père et la vaillance de sa mère, et sa gaieté à lui. Il n'y avait de véritable que la souffrance de ses parents, étale et torpide, et son impatience de les quitter pour ne la plus subir. Il savait que, le seuil franchi, sa tristesse tomberait comme un voile gênant, arraché par la course vers l'action, l'avenir..."

J'ai pris ce livre dans mes mains, lu la première page et il ne m'a plus quitté jusqu'à ce que j'atteigne la dernière ligne. Ah, comme j'aimerais savoir écrire comme Joseph KESSEL. En trois mots, tout est dit. Le talent de l'auteur vous cueille à l'estomac. J'en fus tellement conscient, en cette minute, que je décidai de vous le dire. Comme ça, simplement.

Vous en ferez ce que vous voulez!


jeudi 19 juillet 2012

Tigridia fleur d'un jour

Tigridia:

Ephémères comme le bonheur, elles apparaissent furtivement dans le jardin de Maguy, prennent la pose puis trépassent. Les abeilles ont à peine le temps de les convoiter. Les bourdons sont dans la peine et la seule épitaphe qui conviendrait sur leur tombe tient en un seul mot: "Fut".


Baudelaire n'en fit pas les fleurs du mal et pourtant ce sont des passantes auxquelles il eut pû dédier son poème.

Mais, elles ne nous en laissent pas le temps et se flétrissent plus vite encore que les roses de Ronsard. Trop belles, trop fragiles, elles ne sont que dans le présent et pourtant ne peuvent être offertes.






Ainsi, elles n'appartiennent à personne et ne demandent que le respect dû aux œuvres de la nature.







Une fleur qui mérite un petit haiku:

Trois frèles pétales.
Ephémères comme un pleur
Au creux du jardin.

Petit rappel sur les haikus. Trois vers de 5, 7, 5 syllabes inspirés par les saisons.


  Les deux petits derniers sont nés ce matin!

jeudi 5 juillet 2012

Les aventures d'une carte bleue au restaurant La Tagliatella de Saint Saturnin Sarthe

Compte-tenu de l'accueil réservé par le patron du restaurant "La Tagliatella" de Saint-Saturnin je n'ai pas l'intention de me géner pour dire ce que je pense de ce sympathique restaurant!

Récit:

Le samedi 30 juin, nous nous attablons à quatre en terrasse de cette "pizzeria".
Bon accueil au départ, service rapide, bonne cuisine.
Vers 14H00, nous quittons l'établissement.
Vers 14H30, je téléphone pour dire que nous avons oublié le sac de ma femme sur la chaise. Réponse: "Pas de problème nous mettons de côté".
Vers 18H00, nous venons chercher le sac. On nous affirme qu'iln'y a jamais eu de sac retrouvé.
Le cuisinier est extrêmement désagréable, à la limite de nous mettre dehors. Le patron est odieux, fuyant, désagréable au possible.
Quand le serveur arrive, vers 19H00, il nous jure qu'il n'a pas trouvé de sac.

Suite des évênements:

Le mardi, je me rends compte que des achats ont été passés sur INTERNET, entre 15H00 et 19H00 ce samedi là. Comme j'ai fait opposition à 19H00, plus d'achats par la suite.
Je réussis à contacter le site où les achats ont eu lieu. J'apprends ques trois chemises vont être livrés dans une station service du Mans, point relais, à partir du mercredi midi.
Ce mercredi, la BAC arrête un des serveurs de La Tagliatella qui venait, benoitement, chercher ses jolies chemises, avec la carte d'identité de ma femme.
 Je pense qu'il a gagné sa journée.

J'adresse mes plus vifs remerciements au patron de La Tagliatella et me réserve le droit de mettre les commentaires appropriés sur les nombreux sites sur lesquels j'émets des avis "éclairés".

Quant à vous, fidèles lecteurs, je vous invite à faire un grand détour lorsque vous verrez cette enseigne. Ou alors, payez en liquide.

lundi 2 juillet 2012

Un haïku pour une Haïdjin surréaliste


Sur la pierre bleue
Luit une grenouille verte
Comme ses lentilles.




La mare s'éveille
Ridée par les baisers froids
de l'air matinal

dimanche 1 juillet 2012

Histoire d'eau

Il était une fois, ainsi vont les histoires qui de tous les enfants éclairent la figure. Les miennes sont plutôt réservées aux adultes. C'est ainsi! Où trouves-tu tout ça me disent les amis. Je ne leur réponds pas. Mes morbides histoires sont au noir de mon cœur. Là sont celées mes peines, mes frayeurs, mes regrets. Mes secrets sont farouches comme des femmes battues. Au ciel sombre de mon lit sans dais, ils défilent sans lumière et pourtant éclairent mes insomnies de fulgurantes angoisses.
Chacun d'entre nous, au fond, vit recroquevillé dans sa peau trop étroite et les deux lucarnes de toit qui permettent de regarder le monde, ne livrent de nos pensées qu'un iris bleu, marron, parfois gris cendré, entourant une petite pupille noire qui n'est même pas de la nation. Sous sa mauvaise humeur aqueuse, elle se dérobe pour ne pas révéler l'agencement intérieur de son corps vitré.
Avec l'âge, il advient que seul le rire reste christallin, comme pour se moquer de l'opacification de nos lentilles naturelles. C'est, là encore, un artifice de camouflage. De plus en plus tranquilles, nous pouvons contempler nos secrets derrière le voile blanc de la cataracte. Seuls!

jeudi 21 juin 2012

André RIEU Alte kameraden

En hommage à mon papa né le 15 juin 1915 et décédé à l'âge que j'ai actuellement, une marche militaire comme il les adorait.
Mon père avait tellement de défauts que nous ne nous comprenions plus
Il m'arrive parfois de penser que j'en ai plus que lui, pas les mêmes certes, mais qui font que certaines personnes ne me comprennent plus.
La roue tourne.
Mon papa jouait de la grosse caisse dans la fanfare de son régiment.
Je joue parfois de la grosse caisse mais, seulement, au sens figuré.
Je n'ai jamais parlé à mon père. Quand je dis "parlé", je pense à une conversation digne de ce nom.
Maintenant, il est trop tard. Depuis 32 ans, il est inaccessible.

 
***

mercredi 6 juin 2012

Statue vivante. Nouvelle par Zabulle

Maman est nerveuse. Elle sert fermement la main de la petite fille en l’entrainant vers la place de l’église.
Les rares passants, en ce froid matin d’avril, jettent un regard furtif au couple. Il est manifeste que la grande personne a bien du mal à imposer sa volonté à la gamine boudeuse qui n’aide en rien à leur progression.
Sans ces quelques témoins, Hélène utiliserait des moyens plus coercitifs mais elle se contente de maintenir fermement la main qui se dérobe et entraine l’enfant vers l’édifice massif qu’elle aperçoit maintenant en bout de la rue.

Maman est inquiète. Sans en parler à son époux, elle a décidé une thérapie risquée pour en terminer avec une phobie très particulière de sa fille. Il n’existe sans doute pas de nom pour cette maladie.
Certaine personnes ont peur des reptiles, herpétophobie, peur des araignées, arachnophobie, ou peur d’avoir peur, tout simplement. Il existe des centaines de phobies.
Mélanie a peur des statues ! Cela ne s’invente pas. Il semble que cette phobie ne porte pas de nom particulier.
Lorsque Mélanie aperçoit une statue sur sa stèle, au milieu d’une place, sur une pelouse de jardin public, au centre d’un bassin, elle se fige de terreur, tremble de tous ses membres et refuse tout mouvement.
Il faut alors la porter, faire un grand tour autour du personnage de fonte ou de marbre, sous les yeux étonnés des personnes qui assistent à la crise.

Maman connaît la raison de cette phobie. Quelques années plus tôt, Mélanie accompagnait Hélène dans les rues piétonnes d’Angers lorsqu’un de ces énergumènes qui se juchent sur un petit piédestal, peints de couleur bronze et figés dans une immobilité trompeuse attira l’attention de la petite. Sans méfiance, elle s’approcha d’une sorte de grand guerrier métallique et en fit le tour. Les spectateurs riaient sous cape.
Vous devinez la suite. Lorsque le soldat en acier se pencha sur elle, avec une flexion brusque du torse et toucha son épaule, elle se mit à hurler de frayeur. Personne ne se rendit compte du traumatisme profond que cette enfant venait de subir.

Maman a consulté. Les psychologues ont été unanimes. Il fallait soigner le mal par le mal. On habitue les ablutophobes à la baignade en commençant par des bains de pieds. On lâche peu à peu la main des agoraphobes au milieu des places. On emmène les hylophobes dans les bosquets, dans les bois puis dans les forêts.
Pour Mélanie, il suffirait de décrire des cercles de plus en plus rapprochés autour des Apollons et autres Venus de jardins publics pour obtenir le résultat escompté.
Rien n’y fit. Pas plus Rodin que Carpeaux ne purent retrouver grâce auprès de la petite.

Maman est décidée. Hélène ne veut plus s’en laisser compter. La manière douce ayant échoué, la manière forte s’impose. Elle serait du genre à emmener un nécrophobe à la morgue ou dans les catacombes, un thalassophobe à Berck plage.
Elle emmène Mélanie à l’église du bourg.
La bâtisse millénaire abrite assez de saints, de saintes et de représentations divines en plâtre coloré pour venir à bout de cette maladie. Après une heure ou deux passées à leur contact, Mélanie sera guérie, définitivement !
Et, s’il le faut, Hélène égrènera un chapelet aux pieds de la Vierge Marie.

Maman passe à l’acte. La porte de l’église est massive, les veines torturées de son bois, creusées par des siècles de pluies, vont de ferrures en ferrures, comme autant de sillons hostiles. Son grincement sinistre ouvre pour Mélanie l’accès à un enfer. Elle s’agrippe au chambranle mais rien ne peut s’opposer à la détermination de sa mère. Poussée, trainée, houspillée elle atteint le centre de la nef romane, dans une semi obscurité.
Elle se fige alors dans une sorte de cataplexie douloureuse. Ses muscles ne répondent plus et c’est miracle qu’elle reste debout.
Hélène s’éloigne d’elle à reculons, franchit le porche et referme la porte. C’est diabolique, idiot et sans appel.

Maman a eu tort. Adossée, le cœur battant à tout rompre, au bois rugueux, Hélène tend l’oreille. Un lourd silence répond d’abord à son attente anxieuse puis, strident et insupportable un cri jaillit de la nef, transperce les planches noueuses, vrille les tympans de la mère indigne. C’est un incroyable hurlement. Les sorcières devaient crier ainsi quand les flammes mordaient leurs mollets.
Hélène hésite puis, ce qui lui reste de lucidité maternelle réveille ses entrailles. Elle se jette sur la poignée de porte au moment où les cris s’arrêtent, comme avalés par la muraille.
Ses yeux s’habituent à la pénombre puis elle distingue une incroyable scène. Saint Sébastien est penché, torse nu et transpercé de flèches sur la fillette évanouie. Le curé d’Ars lui caresse les cheveux avec gentillesse tandis que Sainte Thérèse la berce sur ses genoux. Du fond de la nef arrive Jeanne d’Arc, brandissant un étendard de satin.

Maman perd la raison. Elle sort de l’église et tient des discours incohérents aux quelques personnes accourues. Puis elle s’évanouit sur les pavés du parvis.


Sur le côté du porche il y a une affichette.
Festival des statues vivantes.
Ce soir, répétition générale des artistes.
Ne pas déranger SVP.



 Pour me dédouaner de l'emprunt de cette photo, je vous invite à visiter le site très intéressant de Flepi

mardi 5 juin 2012

La crypte. Nouvelle par Zabulle

L'homme s'assoie souvent au dernier rang gauche de la nef, tout de suite après le narthex. Croyez bien que je n'utilise pas ce vocabulaire pour faire savant mais, c'est comme cela qu'on appelle les premières travées, inoccupées, d'une église romane. On y trouve le bénitier, vide de toute eau bénite car, personne dans nos vieilles églises ne remplit ces récipients. D'ailleurs, à quoi cela servirait t'il? Plus aucune grenouille ne se penche sur ces anciens miroirs pour y baigner un doigt arthritique.
Certains matins, par le grand vitrail de droite, les aurores ensoleillées projettent dans cette nef une lumière mystique. On se prendrait à y croire, comme Moïse devant son buisson ardent, ou Baudelaire devant un buisson poilu.
Sous ses pieds, l'homme le sait, il y a des dizaines de sarcophages. L'église a été édifiée au XIe siècle sur un immense cœmeterium. C'est assez banal. Quelle ville, quel village, n'a pas son cimetière mérovingien? Qu'on veuille faire passer une canalisation ou, simplement, planter un rosier dans le jardin du curé, on trouve les os gris d'un mérovingien, tapi dans son auge de pierre depuis douze ou treize siècles, calme.
Quand Robert le Fort, en 866, fut occis en cet endroit par des bretons et des normands venus piller la Francie occidentale, ces sarcophages étaient déjà là, sous l'église primitive. Les combattants n'en avaient sans doute pas conscience. Le corps du comte d'Anjou ne fut jamais retrouvé. On dit que son fantôme fait encore les cent pas, les nuits sans lune, dans le transept. Il descend de son piédestal, embarrassé par cette francisque que David d'Angers lui a mise dans la main droite et par un bouclier aussi anachronique que pointu. Sa broigne se prend dans les aspérités de la stèle qui porte sa statue mais il parvient à ses fins. lugubre, il déambule dans la nef déserte, va saluer le curé d'Ars et Saint Sébastien, baise la main que lui tend Jeanne d'Arc puis, tous quatre entament une partie d'osselets. Jeanne est gênée par d'anciennes brûlures et Sébastien gratte ses flèches mais l'ambiance est conviviale.
Un jour, Jeanne, troublée par le torse nu de Sébastien faillit perdre son titre de pucelle. Mais, Sébastien gêné par ses blessures et le regard de Sainte Thérèse, ne put décocher sa flèche.
Mais, revenons au visiteur assis au dernier rang. Il s'est vaguement assoupi sur son inconfortable banc et s'ébroue au moment où le mouton porté en travers des épaules du berger lui demande de lui dessiner un petit prince. Il comprend alors qu'il a abusé de ce bon vin d'Anjou qui anime parfois les statues, se lève et marche vers le chœur de l'édifice, un autel tombeau de marbre noir, supportant un grand thabor doré.
La nuit est assez avancée pour qu'il puisse rejoindre sans crainte son lieu de repos habituel. Il appuie son index sur un petit triangle maçonnique incrusté à droite de l'autel.
Le grand tombeau noir pivote en grinçant et une odeur de salpêtre et de moisi envahit le chœur. Un escalier de pierre, luisant d'humidité apparaît. Joseph s'y engage sans hésitation, descend quelques marches et appuie sur un sexe d'angelot qui n'est là que pour faire mentir la légende et refermer le passage.
Maintenant, il est à quelques mêtres sous l'abside abritant la sacristie. Il tâtonne un peu pour trouver une boite d'allumettes, laissée en permanence dans une anfractuosité, allume une bougie.
Dans un coin de cette cave secrète, il y a une grande pierre plate sur laquelle il a jeté une sorte de galetas plein de vermine. La première fois où, par hasard, il a découvert ce que nous appellerons maintenant une crypte, il y avait sur la pierre quelques os recouverts d'une sorte de broigne, une épée rouillée, un crâne auquel adhéraient encore de longs cheveux blancs. Il en a fait un tas dans un coin, pour dégager la place qui lui sert désormais de couche.
Voila, il est chez lui pour la journée et ne ressortira que tard ce soir, pour faire un tour dans le village endormi, pour voler quelques choux chez la Marie, un poulet chez le Patrick, et baiser une fillette de vin à la société de boule de fort.
Les rares visiteurs ne pourront pas soupçonner sa présence et même ses sonores ronflements ne parviendront pas à leurs oreilles. Il soupire d'aise, retire ses godillots et son pantalon de velours marron, s'enroule dans une grande chasuble trouvée un jour dans la sacristie et s'endort paisiblement.

Les mauvaises odeurs ne font pas frissonner sa narine.
Il dort dans le tombeau, la main sur sa poitrine,
Tranquille. Il a une coulée rouge au bord des lèvres.
Mais ce n'est que du vin d'Anjou.
Et lui, c'est le dormeur Duval.

Mes nouvelles vous plaisent. J'en suis fort aise. Retrouvez les premières en cliquant sur un de ces liens:

dimanche 27 mai 2012

Bernard Henry Levy, Messie des temps modernes. Le serment de Tobbrouk sans le taxi.

Si "Le diable s'habille en Prada", d'après David Frankel, le Messie s'habille avec une chemise blanche et un complet noir.
Figure de proue du messianisme moderne, notre BHL national précède, avec allégresse, le pas de tous les dirigeants internationaux qui seraient tentés d'intervenir dans les nations en guerre, larvée ou civile. On sent que, désormais, son regard noir est tourné vers la ligne bleue du Djebel Ansariyya. (Syrie)
Compte tenu de l'état de nos ressources, bien entamées par notre intervention en Libye, il aurait bien du mal à convaincre la nouvelle équipe au pouvoir de distribuer le reste de nos missiles chez Bachar al-Assad et n'y songe sans doute pas. Il faut dire que cette affaire constituerait une autre paire de manches que celles qui dépassent de son complet noir.
Une des faiblesses de Khadafi fut de ne pas avoir d'appuis au sein du conseil de sécurité de l'ONU, le nouveau machin. Bachar, lui, a des copains en Chine et en Russie. Personne n'ira lui damer le pion, Houla!
Cependant, si vous apercevez un jour BHL, habillé d'un djellaba blanc, descendre de son dromadaire dans la cour de l'Elysée, souvenez vous de Peter O'Toole, alias Lawrence d'Arabie, arranguant ses troupes arabes en criant "DAMAS!
Bon, tout ceci pour dire qu'il vous appartient, ou non, d'aller écouter le monologue de BHL dans "Le serment de Tobrouk". Pour y aller, prenez un taxi et souvenez vous que:
"Deux intellectuels assis vont moins loin qu'une brute qui marche!", célèbre réplique du film de Denys de la Patellière.

lundi 23 avril 2012

Le bateau ivre

Nous allons mettre à l'Elysée un nouveau locataire, pour quelques années. Il épuisera rapidement le capital confiance que nous allons, par la même occasion, lui accorder. Alors, lassés par la pérennité de la crise et l'inefficacité des gouvernements mis en place, nous attendrons les élections suivantes pour renouveler ce processus stérile. Et ainsi de suite. C'est ce qu'on appelle la démocratie.
Aucun de ces hommes, ou femmes, n'est capable de contrôler le bâteau ivre sur lequel navigue notre petite nation. Pourtant, nous faisons semblant de croire qu'il en est de meilleurs que d'autres. Nous les écoutons débiter leurs couplets. Nous les jugeons à l'aune de leur habileté déclamatoire. Leurs colères nous amusent, leur art nous captive. Nous guettons leurs faux pas, leurs mensonges. Nous sommes spectateurs de leurs pantomines. Certains ont échoué, au premier tri, car ils ont été pris la main dans la culotte d'une soubrette. D'autres étaient, carrément, des erreurs de casting, lunettes comprises!
Tout se passe comme si, après que la vigie du Titanic eut aperçu l'iceberg, les passagers s'étaient réunis dans la grande salle de spectacle pour élire, à juste raison, un nouveau commandant. Quelques ambitieux se présentant en déclamant des vers de Virgile, en interprêtant Feydeau ou en jouant de la clarinette, pour ne pas dire du pipeau, auraient sollicité les suffrages des présents. L'élu, acclamé par la foule se serait ensuite enquis de l'emplacement des chaloupes, réservées par les plus riches, pour y embarquer quelques bagages. Dans le même temps, les soutiers, réunis en conclave dans 20cm d'eau, auraient voté la grève.
Les commandants précédents nous ont conduits droit sur l'iceberg, à bord de notre navire insubmersible, en augmentant la vitesse pour battre le record de la traversée. En essayant de l'éviter, au tout dernier moment, ils lui ont présenté la partie la plus fragile, notre flanc, que  la partie immergée de la finance a largement entaillé. Les suivants n'ont plus qu'à compter les chaloupes. Elles ne sont pas assez nombreuses!
Vous l'avez compris, je ne suis pas d'un optimisme béat sur les suites de ces élections.

vendredi 20 avril 2012

Notre Dame de Brissarthe sur WIKIPEDIA

Depuis quelques jours, l'église Notre Dame de Brissarthe fait l'objet d'un article sur wikipedia.
On peut se connecter par:
http://fr.wikipedia.org/wiki/%C3%89glise_Notre-Dame_de_Brissarthe

J'avoue être l'auteur de cet article et, si vous y trouvez des incohérences ou des erreurs, n'hésitez pas à me le faire savoir...

mercredi 7 mars 2012

Le Chœur d'Hommes d'Anjou à Brissarthe (28 avril 2012)

Dernière minute: N'hésitez pas à réserver vos places pour ce concert exceptionnel car, l'église de Brissarthe ne peut accueillir que 300 personnes au grand maximum.
Pour cela, il suffit de m'envoyer un mail avec vos nom, prénom, adresse et le nombre de places retenues.
Pour plus de dix places, tarif préférentiel. (10€)
Je vous indiquerai en réponse comment régler ces places qui seront mises à votre disposition à l'entrée du concert.





Voilà un évènement à ne pas manquer. Je ne saurais trop conseiller de réserver vos places à l'avance car il devrait y avoir foule pour ce concert.

Le programme est le suivant:

 
1ère partie

Dostoïno iest (Liturgie orthodoxe - P.Chesnokov)
Ave Maria (Liturgie – L.Janacek)
Dir, Seele des Weltalls (Cantate KV 429 – W.A.Mozart)
Die Nacht (F.Schubert)
Sanctus (Messe solennelle de Ste Cécile – C.Gounod)
Zocharti Loch (Liturgie juive – L.Lewandowski)
Yerushala’im (Traditionnel hébreu)
Cantate pour Mauthausen (G.Boussion, T.Dechaume, JJ.Roux – J.Riche)

2ème partie

Gwahoddiad (Traditionnel gallois – L.Hartsough – I.Gwyllt)
There is a star (Comédie musicale – Charles Georges)
Battle Hymn of the Republic (W.Steff)
La Flute Enchantée (Chœur des Prêtres – W.A.Mozart)
Norma (Chœur des Guerriers Gaulois – G.Bellini)
Rigoletto (Chœur des courtisans – G.Verdi)
Macbeth (Chœur des Sicaires – G.Verdi)
Boris Godounov (Chœur des Vagabonds – M.Moussorgsky)
Faust (Chœur des Soldats – C.Gounod)

Bis

Uzh ty pole maîo (Traditionnel russe)
Nathalie (G.Bécaud)
En route (Traditionnel russe)

mardi 6 mars 2012

Le chœur d'hommes d'Anjou sera à Brissarthe le 28 avril 2012

 Le 28 avril 2012, à 20H30, l'église de Brissarthe accueillera le Chœur d'Hommes d'Anjou.
Ce sera, sans nul doute, une soirée mémorable pour l'association de sauvegarde du patrimoine brissarthois qui a pu obtenir le concours de cette chorale prestigieuse.
Je vous donnerai, le plus rapidement possible, les détails d'organisation de cette soirée mais, d'ores et déjà, réservez cette date sur vos agendas!!!!
        Photo Angibaud Vihiers



dimanche 26 février 2012

Islande. On ne nous dit pas tout!

Je me demandais où aller me ressourcer après quelques évènements douloureux. L'année 2012 semblant devoir être mon Annus horribilis, bien que je ne sois pas la reine d'Angleterre, il va falloir que je trouve un lieu de chute alliant poésie, beauté, originalité, solitude choisie, proximité encore plus choisie! La Sibérie est difficile d'accès et Sylvain TESSON a déja écrit son livre. Je viens de le terminer.
Alors, je suis presque décidé à aller en Islande quelques semaines.
Avec le printemps qui arrive, cela doit être fabuleux de tremper sa carcasse dans les sources d'eau chaude, de regarder les magnifiques islandaises, de dormir dans des maisons en bois, de pécher dans des eaux limpides, d'avoir froid.
Et puis, dans ce pays, se met en place, actuellement, une vraie révolution!
Sans égorger personne, sans pendre ni eviscérer quiconque en braillant des imbécillités, sans mettre en place les barbus, sans bruit, les islandais ont viré leurs hommes politiques de droite comme de gauche et ont fait appel à des gens simples, comme vous et moi, pour redonner courage à leur pays, ruiné par les anciens dirigeants, par les banquiers, les boursicoteurs.
L'Islande est en train d'inventer une nouvelle démocratie.
Oh! Ne cherchez pas d'informations sur cette révolution incroyable dans les journaux français. C'est trop simple, trop beau, trop radical!
Les Pays Bas et le Royaume Uni, qui boursicotaient avec une banque islanadaise nommée ICESAVE, réclament maintenant près de 4 milliars d'Euros à ce pays! Les politiques ont dit "OK, on va s'arranger!"
"Cela ne fait que 100€ par mois, pendant huit ans, pour chaque islandais". Une paille!
 Les islandais ont dit "Non mais, ça va pas?". toute la différence est là!
Exit les banquiers, les boursiciteurs, les politiques!
Merveille de la désinformation. Un événement aussi considérable qu’une véritable révolution démocratique, telle qu’on n’en a jamais vue en Europe, peut se produire sans que la presse, ni google, ne permettent d’en savoir quoi que ce soit. C’est sûr qu’à l’heure de la consolidation anti-démocratique que vivent la plupart des pays européens, l’exemple islandais ne fait pas vraiment l’affaire de nos régimes policiers, qui montrent là encore leur aptitude à verrouiller rigoureusement la conscience collective.

Dixit: Passe Veille Info  (Cliquez pour en savoir plus.)
En attendant, régalez vous avec cette très belle vidéo.
Un grand merci à mes bigarreaux préférés!
Message codé!

jeudi 23 février 2012

Des idées d'économie pour nos ministres et députés. Qu'attendent-ils?

La mentalité de nos ministres est vraiment à cent lieues de celle des ministres norvégiens. Le jour où ils agiront comme ceux qui sont présentés sur cette vidéo, je serai réconcilié avec la classe politique française. C'est valable pour nos fonctionnaires.
Il faut reconnaitre que nos esprits sont déformés par des années de mauvaises pratiques.
A l'occasion de l'énorme crise qui nous attend, c'est le moment d'une vraie révolution des mentalités!

jeudi 16 février 2012

Le sarcophage mérovingien. Nouvelle.

Arthur et Adam sont, dans ce village des bords de Mayenne, deux garnements redoutables dont les espiègleries, doux euphémisme, font rarement l'unanimité, sinon contre eux. Alliant un manque total de sens moral à une incroyable cruauté, ils traquent leurs victimes au sein des  plus démunis ou s'attaquent aux chats et aux chiens qui ont le malheur de croiser leur route. 
Sans qu'on puisse leur imputer ce méfait de manière formelle, la vieille Honorine a ainsi retrouvé son chat soigneusement tondu, de la queue aux moustaches. Si on devait accorder un triple A aux deux lascars, ce serait un triple bonnet d'âne.
L'école a reçu plusieurs fois leur visite et ses murs en portent encore la trace. Car, s'ils y entrent parfois, c'est rarement aux heures des cours, systématiquement séchés.
Les familles d'Arthur et Adam sont voisines. Aux franges du bourg, elles ont investi deux masures sordides, encombré les abords de ferrailles et d'ustensiles divers, aussi inutiles que laids. Les villageois évitent cet endroit et leurs locataires mal embouchés. C'est un univers propice à l'éclosion de sauvageons du genre des deux acolytes.
Le maire n'ose plus aller se plaindre auprès des responsables de ces gosses. Responsable est d'ailleurs un mot à bannir du vocabulaire de ces familles. Un haussement d'épaule est la réponse habituelle quand ce n'est pas une bordée d'injures.
Bref, libres de toute contrainte, Arthur et Adam errent dans les bois, les chemins et les rues, à l'affut des mauvais coups possibles et des objets à voler. L'occasion faisant le larron, les habitants évitent de leur donner l'opportunité de nuire. Les voitures sont fermées, les portes closes, les vélos cadenassés. 
Pour visiter l'église, il faut en demander la clé au restaurant de la place. Depuis, les bougies ne disparaissent plus, le bénitier n'est plus envahi par des grenouilles, les cloches ne se mettent plus à sonner à des heures indues.
En ce lundi du mois de mai, les faux jumeaux rodent autour de la vieille église. C'est l'heure où les gens ordinaires sont dans leurs draps, même si la douceur du temps les a incités à veiller. Il y a une limite à tout, une heure pour les hiboux, une heure pour les hommes. Ces deux là, comme les  nocturnes rapaces, dorment le jour et volent la nuit. Au devant de l'édifice millénaire, des barrières et des panneaux indiquent qu'une profonde excavation a été creusée, destinée à recevoir les canalisations du tout-à-l'égoût. Il doit bien y avoir quelques outils abandonnés, offerts à la convoitise des enfants.
Mais, les ouvriers n'ont pas été négligents.
Au fond de la tranchée, on aperçoit une dalle en pierre. Dans ce village, il suffit de creuser un trou pour tomber sur un des nombreux sarcophages qui peuplent un ancien cimetière mérovingien. A chaque fois, on ouvre le tombeau de pierre, on espère y trouver un trésor ou des restes d'intérêt historique. Pour celui là, on a remis au lendemain cette recherche traditionnelle. La nouvelle en a circulé. Elle est venue aux oreilles des garnements.
Pourquoi attendre? Brisée en trois morceaux par la pelleteuse, la dalle n'est pas assez lourde pour résister à leurs efforts conjugués. Un des fragments glisse sur le côté. Malheureusement, le faisceau de leur lampe de poche ne rencontre que du vide. Ce n'est pas aujourd'hui que ces pilleurs de tombe d'occasion feront fortune.
L'horloge du clocher égrène six coups. Déjà! Il va falloir rentrer.
C'est alors qu'une idée saugrenue germe dans l'esprit d'Arthur. Le maire et ses adjoints ont annoncé que la tombe serait ouverte à sept heures, en public. Quelle belle occasion de faire une de ces farces dont ils ont le secret. Elle ne sera pas plus goûtée que les autres mais ce n'est pas le genre de réflexion qui les arrête.
L'inventeur de la blague demande à Adam de se glisser dans le sarcophage. Pas trop rassuré, l'enfant se glisse par l'ouverture qu'ils ont pratiquée et Arthur, tant bien que mal, réussit à remettre en place le bout de couvercle dérangé. Il a expliqué à Adam que, tout-à-l'heure, lorsque les édiles soulèveront le couvercle de granit, ils trouveront, en guise de trésor, un petit diable. La presse sera présente et leur notoriété franchira les limites du bourg.
Puis, Arthur s'éloigne en sifflotant.
Quelques minutes plus tard, en tentant de récupérer sa casquette tombée dans la Mayenne il glisse et se noie. Il ne savait pas plus nager que lire.
Ce matin là, le maire fait savoir au chef de chantier que la cérémonie matinale est annulée. sans rien dire à quiconque il a jeté un œil dans le sarcophage, la veille, et compris que le jeu n'en valait pas la chandelle.
A sept heures, la pelleteuse pose un énorme tuyau de fonte dans la tranchée et la comble de gravats.
Les jours suivants trois ou quatre personnes assistent à l'enterrement d'Arthur.
Les jours suivants on se met à la recherche d'Adam.
Aujourd'hui, on le cherche encore!

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mercredi 15 février 2012

La vengeance de l'arbre. Nouvelle.


Joseph pose la main sur le tronc rugueux du peuplier et, levant les yeux vers sa cime, évalue sa hauteur. L'arbre culmine à une vingtaine de mètres comme la plupart de ceux qu'il a abattus ces jours ci. Méthodiquement, il a couché les futs de bois blanc en travers de la plantation, les a débités, transportés, fendus et alignés en rangées impeccables. Il s'attarde parfois au long des stères de bois, satisfait de son travail puis repart vers la peupleraie. Ce travail est sa drogue, son plaisir, un jeu de démolition puis de reconstruction. Il est le maître d'œuvre de ce passage de la verticalité à l'horizontalité pour des dizaines de ces arbres. Les jours de grand vent, les futures victimes de sa tronçonneuse semblent s'ébrouer, se concerter, s'agiter en leur fuite immobile. Les pieds dans la glaise, ils se penchent vers ce nain dont la machine mord dans leur tendre aubier, puis fait voler les copeaux. Une première entaille en V désigne le côté vers lequel ils doivent tomber. Puis Joseph tourne autour du tronc et entaille l'autre côté jusqu'à ce que, dans un sinistre craquement, le peuplier s'effondre vers le sol, écrasant quelques jeunes frènes au passage.
La coupe est bien avancée. Chaque jour, la clairière ainsi creusée étend sa surface vers la rivière toute proche. Le pré retrouve peu à peu son alopécie primitive. On pourra, de la route qui jouxte le terrain, apercevoir les rives de la Sarthe, plantées d'aulnes et de frènes.
Joseph pense sans plaisir à la fin de son chantier. Il a rarement l'occasion de s'attaquer ainsi à une plantation entière. Il devra ranger sa tronçonneuse quelque temps, pour longtemps peut-être. Qui sait?
Pour l'heure, il cherche de quel côté penche l'arbre qu'il va sacrifier. Celui là semble trop penché vers l'intérieur du bois pour espérer le faire tomber dans la clairière. Il va falloir accepter son choix de végétal tétu.
Qu'à cela ne tienne, cela va compliquer le débitage du fut mais tant pis. A la guerre comme à la guerre.
Joseph fait sa première entaille à un mêtre de hauteur puis attaque l'autre côté. Bientôt la colonne de bois vacille puis tombe lourdement et vient s'encastrer entre les arbres saufs.
Pris dans ces tenailles de bois, le peuplier a maintenant une drole de position. Il est encore attaché au niveau de l'entaille et, horizontal mais, à un mètre de hauteur, il est coincé dans la peupleraie.
Joseph jure entre ses dents. Ce n'est pas une situation idéale. Il va falloir jouer serré.
D'abord libérer l'arbre de cette lanière d'écorce qui le retient à son moignon, puis le débiter.
Mais, sans le savoir, l'homme a mis en place un piège. En se coinçant entre ses frères de race, le peuplier s'est mis en tension. C'est un ressort mortel, simplement retenu par cette lanière d'écorce que Joseph s'apprête à couper. C'est une énorme tapette prête à fonctionner dont Joseph serait la souris.
L'homme approche la chaine de sa tronçonneuse. A-t'il conscience de son erreur lorsque l'arbre le cueille au niveau du bassin, l'emporte sur deux mètres et s'abat sur lui dans un bruit sourd? Lui seul pourrait le dire si la vie ne s'était pas retirée de lui comme le ferait la pâte d'un tube de dentifrice.
La nouvelle, dans un bruissement de branches, court de peuplier en peuplier.
On l'a eu!

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