jeudi 9 décembre 2010

Les leçons oubliées de l'Histoire

Confucius enseignait que "Les rois doivent être de vrais rois et les ministres de vrais ministres". Je doute de l'impact de ces sages paroles sur les tenants actuels du pouvoir en France. Surtout quand Hortefeux ne voit pas la pagaille qui règne sur les routes enneigées. On ne lui demandait même pas d'y aller mais de regarder la télé!
Mais, élargissons ensemble le débat. L'anthropologue Luc de Heutch affirme que "l'Etat est nécessairement pétri de sacralité". Il faut comprendre ce concept dans un sens très large, adaptable à toutes sortes de coutumes, de religions, de rites mais, intangible dans le caractère même de cette nécessité.
Je vous donne quelques exemples:
- Dans les sociétés tribales le "souverain", s'il veut durer, se place hors de la masse des individus qui lui sont soumis. Il ne se soumet pas aux us et coutumes de son peuple, il est au dessus d'elles, il les transcende, en quelque sorte. Pour être sacré, aux yeux de ses congénères, il se doit d'être supérieur. Atteindre cet état de supériorité passe parfois par des actes particuliers qui lui permettent de se hisser au niveau du sacré puis de s'y maintenir. Le parricide, aussi bizarre que cela puisse paraître est une passerelle connue vers le sacré. Il permet d'éliminer l'ancien souverain et de frapper les esprits. Sur un plan social, l'inceste est également connu comme un moyen de maintenir une dynastie hors de la sphère du peuple. Tout un arsenal de rites vient ensuite conforter cette sacralité. Des cérémonies et des coutumes contraignantes placent le souverain sur un piédestal bien commode. J'ai participé, en Nouvelle Calédonie, à ces rites qui consistent à respecter tout un cérémonial
d'un autre âge pour avoir le droit de mettre le pied dans une tribu, ou dans une ile. Cela s'appelle faire la coutume et les chefs de tribu maintiennent soigneusement ces rituels. Il était parfois amusant de voir des généraux de haut rang faire face à un canaque en sandalettes, vêtu d'un short et d'un t-shirt miteux, et lui offrir avec respect deux paréos et un paquet de tabac.
- Au Japon, l'empereur traverse les siècles et les guerres, intouchable, dieu vivant vénéré et adulé. Lorsque les bombes nucléaires eurent anéanti les velléités belliqueuses de la caste militaire, nul n'osa remettre en cause le caractère sacré de l'empire. L'empereur ne fut pas jugé et resta en place.
- En URSS, les dirigeants se plaçaient en haut d'une pyramide de militaires, de policiers et de fonctionnaires que nul ne pouvait escalader sans se retrouver dans un cachot ou au goulag. Les chefs avaient leurs quartiers réservés, leurs lieux de villégiature, leurs restaurants. Si Gorbatchev n'vait pas lui même, scié la branche sur laquelle il était perché, il y serait encore!

Lorsqu'une dynastie s'écroule, c'est que ses héritiers oublient cette nécessité de transcendance. Ils descendent du piédestal, se mêlent au peuple, tiennent les mêmes propos que le vulgum pecus, montrent leurs faiblesses, leurs vices et leurs défauts.
De Louis XIV à Louis XVI, combien de marches descendues vers la catastrophe. L'un était roi de France, l'autre roi des français. La nuance lui coûta la tête. On dit qu'il réparait des serrures, il aurait mieux fait de verrouiller sa porte. 
Les tyrans qui ont baissé la garde l'ont souvent payé de leur vie. Pour maintenir la distance avec le peuple, il faut de grandes épées. Si le peuple entre dans le palais il est déjà trop tard! Nicolas II, tsar de toutes les Russies était un faible. Il a entrouvert sa porte à Raspoutine, le peuple s'est engouffré dans la brèche. 
Pour sortir des pouvoirs d'état, il me vient à l'esprit une des raisons de la chute vertigineuse du pouvoir religieux en France. Ma génération se souvient du cérémonial imposant des messes en latin. Le prêtre, dans des habits sacerdotaux somptueux, tournait le dos aux fidèles. Nul ne comprenait ce qu'il baragouinait mais, cela imposait le respect. De nos jours, ils nous regardent et parlent français. Leurs habits sont beaucoup plus simples et ils mettent cette hostie, que nous n'osions même pas toucher avec les dents, dans nos mains sales. La seule différence c'est qu'il n'y a plus personne dans les églises. Quelques vieilles personnes trottinent encore vers les édifices religieux, le dimanche. Il y en a de moins en moins. (Nota: Je suis athée)

Bref, de tous temps, les rois, les princes et les tyrans se sont maintenus en place en cultivant le mystère et le sacré, ils ont chuté quand ils ont oublié ce concept.

 Certains de nos dirigeants feraient bien de se méfier. En politique il faut être discret sur ses femmes, ses avions, ses voitures, ses montres son salaire, ses faiblesses. Il faut avoir une allure altière, ne pas proférer de propos orduriers, ne pas se servir de bonnes blagues de potache moyen, ne pas tenir la main de la princesse pendant les visites protocolaires. Vous voyez ce que je veux dire?


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