Département
Angers, le 21 juillet 1813
De
Le Baron de l’Empire, Chevalier de la Légion
Maine et Loire
D’honneur, Auditeur au Conseil d’Etat, Préfet du
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Département de Maine et Loire
Cabinet du Préfet
A Monsieur
le Maire de Brissarthe
Monsieur,
Une vingtaine de brigands faisant
évidemment partie de l’attroupement qui s’est manifesté dans le Dépt. de la
Mayenne, vivement poursuivi dans ce Dépt se sont jetés dans le Dépt de Maine et
Loire. Ils ont passé la nuit dernière dans la commune de Tiercé où ils ont
encore été vus ce matin. On est, en ce moment à leur poursuite. Il importe que
vous secondiez de tout votre pouvoir les mesures prises par l’administration
pour arrêter ce fléau. Il importe surtout que tous les individus qui ont
cherché à troubler la tranquillité de ce pays soient arrêtés et que pas un
n’échappe aux recherches dirigées contre cette troupe.
Au reçu de la présente, Monsieur,
vous réunirez le plus d’hommes que possible de votre commune. Cette garde
nationale sera, par vous, établie sur la rive droite de la Sarthe et
postée aux lieux où sont établis le
bourg et où se trouve des chaussées ou moulins. Elle fera de suite amener et
enchainer aux lieux où sont établis les bacs et sur la rive droite, tous les
petits et grands bateaux qui se trouveront exister sur la rivière et les
submergera même, si elle le juge necessaire.
Des patrouilles fréquentes
correspondront tout le long de la rive gauche. Vous établirez sur cette rive un
corps de garde qui deviendra le point central de la force armée de votre
commune. Une sentinelle y sera placée pour veiller sur la campagne et avoir
l’oreille au guet afin de prévenir la troupe au moment où elle entendrait
sonner le tocsin. Sur un point quelconque, à ce signal, la force armée se
dirigera sur le point d’où le tocsin se sera fait entendre, en prenant diverses
routes et éclairant la campagne. Tout individu non connu, armé ou sans arme,
non porteur de papier en règle, sera de suite arrêté soit qu’il se prépare pour
passer la rivière, soit qu’il soit rencontré par la force armée se rendant au
signal.
A l’instant où vous aurez
connaissance que les brigands auront mis le pied sur votre commune, vous ferez
sonner le tocsin mais vous aurez soin de bien vérifier la véracité de la
nouvelle qui vous en a été donnée afin de ne pas jeter l’alarme mal à propos. Les
hommes de garde postés sur la rive droite de la Sarthe veilleront
scrupuleusement à ce qu’aucun individu ne puisse passer sur la rive gauche.
Tout individu qui se présentera sur la rive droite, soit pour forcer le
passage, soit reconnu comme suspect, sera de suite arrêté. Si les brigands se
présentaient en force supérieure pour forcer un passage, les postes voisins seront
alertés par des coups de fusil et au signal, ils se réuniront au point attaqué.
Tous les individus qui auront été arrêtés seront de suite conduits à la caserne
de gendarmerie à Angers.
Je compte, Monsieur, sur tout votre
zèle. Dans cette circonstance, vous
saurez profiter du bon esprit qui anime votre commune et il sera facile de
persuader à vos administrés combien il est important pour eux de faire
disparaître du pays ces brigands dont le séjour prolongé attirerait sur eux les
plus grands malheurs. Ces mesures ne peuvent être de longue durée car, si elles n’ont
pas produit de résultats d’ici à demain, il est à peu près certain qu’ils
seront retournés sur le territoire de la Sarthe ou de la Mayenne, leur retraite
habituelle.
Ces hommes n’appartiennent pas à ce
pays et sont des perturbateurs de l’ordre public qui ne doivent supprimer aucun
intérêt aux honnêtes gens et qu’il importe de poursuivre avec vigueur pour les
dégoûter de venir inquiéter notre territoire. Ne perdez donc pas un instant
pour prendre les mesures que je prescris et qui devront durer deux jours. Ne
perdez pas de temps à attendre que tous vos hommes soient réunis. Dès que
quelques hommes seront réunis, établissez d’abord de petits postes et vous les
grossirez ensuite. Faites vous même la revue de vos postes, encouragez vos
habitants, faites leur sentir que c’est pour leur repos même qu’on les fait
agir et ne négligez rien pour que les bandits ne puissent passer la rivière sur
votre commune. Je compte sur tout votre zèle et sur tout votre dévouement Ne vous occupez pas du tout de diriger des
patrouilles dans l’intérieur des terres, il y aurait confusion et peut être
quelque malentendu fâcheux. Je vous demande de vous borner à bien garder les
passages de votre rivière. Les colonnes que nous avons organisées pour
poursuivre la bande dont on a connaissance se composent chacune de quatorze
gendarmes, de quelques militaires de la compagnie de réserve et d’habitants des
campagnes bien choisis dans l’intérieur des terres. Si vous aviez quelques
renseignements sur la marche des bandits, il faudrait vous hâter de les
transmettre par un exprès à Monsieur le Maire de Tiercé ou à la première
colonne composée ainsi que je viens de vous le dire que l’on rencontrerait.
Surtout, ayez bien soin que le tocsin
ne soit sonné dans votre commune que dans le cas où les bandits voudraient
forcer le passage de la rivière sur votre commune et où vous ne pourriez pas
vous en rendre maître. Il ne faut pas répandre l’alarme inutilement.
J’ai l’honneur d’être avec considération,
Monsieur, votre bien humble et obéissant serviteur.
Signature
(Abdon-Patrocle-Frédéric Hély d’Oissel )
Biographie
Il entra dans l'administration sous l'Empire, qui le créa baron le 31 janvier 1810. Conseiller d'État en service extraordinaire, il fut élu, le 17 novembre 1827, député du 6e arrondissement de la Seine-Inférieure.D'opinions constitutionnelles, il prit place au centre gauche. Il combattit le ministère Polignac, fut des 221, et obtint sa réélection comme député, le 12 juillet 1830. Hély d'Oissel applaudit à la révolution de Juillet et prit part à l'établissement de la monarchie nouvelle.
Nommé conseiller d'État en service ordinaire, il dut solliciter le renouvellement de son mandat, qui lui fut confirmé, le 21 octobre 1830. Il vota en toute circonstance, jusqu'à sa mort, avec la majorité conservatrice, et fut réélu une dernière fois, le 5 juillet 1831.
Ses connaissances pratiques dans l'administration l'avaient fait choisir au conseil d'État comme vice-président du comité de l'intérieur.
Hély d'Oissel était en outre président du conseil des bâtiments civils et du conseil supérieur de santé, et associé libre de l'Académie de médecine.
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